Durant la Première guerre, les francophones du Québec s’insurgent qu’on leur demande d’aller risquer leur vie pour l’Empire en Europe tandis qu’ils sont ici partout victimes de discrimination dans l’enseignement, au gouvernement, à l’usine et à commencer par l’armée canadienne elle-même, une institution essentiellement anglophone.
En juin 1915, les agents recruteurs de l’armée battent la campagne afin de recruter des soldats, l’enrôlement ne suffisant plus à compenser les pertes sur le front. En juillet, deux industriels de Montréal déclarent qu’ils n’engageront plus d’ouvriers francophones «qui devraient plutôt être sur le front». Deux jours plus tard, le journal The Gazette laisse entendre que le Canada pourrait décréter la conscription pour forcer les francophones à «faire leur devoir». Ces provocations conduisent à une série de manifestations qui durent tout l’été, en particulier devant les kiosques de recrutement de l’armée où on scande bruyamment, «Pas de conscription!». Certains rassemblements réunissent des centaines de personnes, notamment le 26 juillet au Champ-de-Mars, à Montréal. Face à eux, un militaire «qui, grimpé sur la bordure de pierre, menaçait, le revolver au poing, de faire feu sur la foule». La situation se détériore et des bagarres éclatent entre partisans et opposants à la guerre, menant à une intervention policière musclée et à des arrestations.
Élizabeth H. Armstrong, Le Québec et la crise de la conscription 1917-1918, Montréal, VLB, 1998, 293 p.
Jacques Lacoursière, Histoire populaire du Québec, 1896-1960. Québec, Septentrion, 1996 : 100-105.